14 Juillet 1789
14 Juillet 2011
Commémoration
Le film monument en deux parties (1ère partie de Robert Enrico) fut réalisé à l'occasion du bicentenaire de la Révolution Française de 1789.
C'est une fresque grandiose, avec un gros budget, d'excellents acteurs, censée faire l'éloge des grands idéaux de Liberté, d'Égalité, de Fraternité.
Un vrai bon film de propagande!
La première partie "Les années lumière" évoque avec lyrisme, la fièvre occasionnée par les nouvelles idées qui animent les élites appelées à jouer un rôle majeur dans la transformation de la société. Une société idéalisée et fantasmée par les philosophes des Lumières, où enfin, règneraient la justice et la paix...Une promesse de Bonheur aprés des siècles de tyrannie et d'opression...
La deuxième partie: "Les années terribles" de Richard Heffron, décrit avec réalisme ce qui ne serait qu'un funeste "dérapage" sanglant: la Terreur .
Mais l'analyse des faits ainsi que les récents travaux (à partir de 1989) de jeunes historiens scrupuleux de vérité historique et dégagés de toute idéologie, démentent cette lecture partisane de cette terrifiante Révolution Française.
Cette Révolution fut, dès son début, la victoire de la canaille sur les honnêtes gens, du mensonge sur la vérité, du crime et de la violence sur la justice.
Cet ouvrage n'entend pas "noircir" des faits qui témoignent par eux-mêmes. Cette violence inouïe, dont les commanditaires se réclamaient pourtant des Lumières, produisit une onde de choc telle qu'elle devait s'étendre sur plusieurs générations.
Il est toujours dans l'intérêt d'une nation et d'un régime politique de faire briller quelques mythes fondateurs mais dans l'intérêt de ceux qui ont pris le pouvoir, de masquer la violence et l'arbitraire sur lesquels ils ont assis leur domination qui, par certains aspects, dure encore aujourd'hui.
L'Histoire ne s'écrit pas comme la mythologie, et son exigence de vérité ne devrait pas s'encombrer de visées utilitaires et partisanes.
Heureusement, après plus de deux siècles de mensonges et d'endoctrinement, des historiens, des philosophes, des intellectuels appartenant à une nouvelle génération, fouillent les archives, font parler le passé et restaure la réalité qui fut bien plus complexe que l'on essaie de nous faire croire...
Tout commence avec la Réunion des Etats Généraux.
Courant janvier 1789 un règlement royal est adressé par le pouvoir aux agents du roi afin d'organiser les élections des députés aux Etats-Généraux.
Dans ce règlement, Louis XVI parle de "droits restitués à la Nation de consentir l'impôt, de la périodicité future des Etats, de l'établissement d'un budget, de la fin de l'arbitraire ministériel en matière de dépenses, de liberté individuelle, de constitution et surtout de l'égalité de tous devant l'impôt".
Le préambule de ce règlement laisse présager un règlement rapide et équitable des problèmes du royaume.
"(...) Sa Majesté (...) s'est déterminée à rassembler autour de sa demeure les Etats Généraux du royaume non pour gêner en aucune manière leurs délibérations, mais pour leur conserver le caractère le plus cher à son coeur, celui de conseil et d'ami.(...) Nous avons besoin du concours de nos fidèles sujets pour nous aider à surmonter toutes les difficultés où nous nous trouvons relativement à l'état de nos finances (...)"
La préparation des élections avait apaisé les campagnes. Il semble qu'il n'y est pas eu véritablement de campagne électorale de la part du pouvoir royal. Par contre à l'échelle régionale, il semble certain que des organisations aient agi en répandant des modèles de revendications et de doléances à travers le pays. Qui finança la diffusion de ces modèles ? Peut être le Duc d'Orléans ... ?
Les élections dans les différents ordres
Chaque ordre vote à part pour élire ses représentants lors d'assemblées de paroisses.
La noblesse vote au suffrage direct. La plupart des représentants élus de la noblesse est issue de la petite noblesse (200 députés) alors que la haute noblesse sera en minorité (70 députés dont le Duc d'Orléans)
Le corps électoral du clergé s'est vu grossi de la totalité des curés issus du Tiers-Etat, ce sont eux qui rendront les assemblées du clergé si houleuses de par leur opposition avec les prélats du haut clergé. Ces assemblées verront l'élection de 200 curés et de 91 prélats.
Le Tiers-Etat reçoit à peu près le suffrage universel puisque tout homme de 25 ans inscrit au rôle des impositions est appelé à voter. D'ailleurs, ce large scrutin du Tiers déconcerte et déplaît fort à certains bourgeois qui se seraient satisfaits d'un corps plus restreint. Dans la majeure partie du royaume, le vote final se fait en assemblées de bailliage au 2ème ou 3ème degré. La députation du Tiers-Etat sera composée de 578 représentants dont environ 200 hommes de loi, une centaine de négociants, banquiers et industriels, le reste étant composé de riches ruraux parmi lesquels une cinquantaine de grands propriétaires fonciers.
Pas un seul paysan pauvre ni artisan n'est représenté dans cette députation.
Les cahiers de doléances
Parallèlement à ces élections, de grands efforts de concertation et de rédaction sont accomplis dans tout le royaume pour apporter une réponse au roi sur les dysfonctionnements de son royaume et les doléances de ses sujets.
Dès janvier, dans toutes les paroisses de France, se rédigent les cahiers de paroisses qui, regroupés, mis en forme et résumés lors des assemblées de bailliage deviendront les cahiers de doléances avec lesquels les députés élus monteront à Versailles.
Un mythe incontournable:14 Juillet 1789, la populace, -manipulée?- cédant à une peur panique contagieuse, s'élance à l'assaut d'une forteresse afin de se procurer des armes pour se défendre. La question de l'insurrection "spontanée" demeure. La nouvelle analyse des faits ferait plutôt penser à une vaste manipulation des masses.
La forteresse de la Bastille n'a pas été prise, elle s'est rendue.
La Bastille est en 1789, une fortification, un ensemble médiéval imposant qui protège la capitale à l'est.
C'est une prison d'État presque vide qui n'abritait en Juillet 1789 que sept détenus: quatre faussaires, deux fous et le comte de Solages, seul à avoir été emprisonné par Lettre de Cachet. C'était peu.
A la fin du XVIIIe siècle, le traitement des prisonniers à la Bastille était décent (bien plus que dans la plupart des prisons françaises d'aujourd'hui !).
Mais les révolutionnaires devaient en faire un lieu sordide, fabriquer un symbole de l'injustice. Dusaulx, comme Le Moniteur universel, dés l'été 1789, s'emploie à cette tâche: ayant fait une inspection de la forteresse pendant sa démolition, qui commence quelques jours après sa prise, il assure avoir découvert des "oubliettes" et des cachots: ce ne sont que des glacières et des latrines...
C'est aussi en Juillet 1789, que se met au point, après les tâtonnements des mois précédents, une véritable technique insurrectionnelle, celle des fameuses "journées révolutionnaires" qui sera systématiquement appliquée, en violation de la Déclaration des Droits de l'Homme, lors des massacres de Septembre 1792, et du génocide vendéen.
Le gouverneur de la Bastille, qui s'était rendu, après avoir subi mille outrages, est assommé sur les marches de l'Hôtel de Ville; le Prévôt des marchands, Flesselles, a la tête fracassée avec la crosse d'un pistolet, les soldats royaux qui composaient la garnison de la Bastille sont tous massacrés par la populace alors qu'ils s'étaient rendus sans armes: ils étaient tous des soldats à la retraite et invalides . Les pillages de boutiques et de maisons ne se comptent plus... Tandis que les honnêtes gens se terrent chez eux. La machine révolutionnaire est en branle...
Durant cette journée du 14 Juillet 1789, on dénombre plus de 350 personnes tuées par la populace, Paris comptant à peu prés 700 000 habitants.
Il n'y aura aucunes arrestations...Le vide judiciaire traduit la vacance du pouvoir royal et encourage tous les criminels.
Mais la victoire de la canaille engage la révolution dans la voie de l'insurrection permanente.
Désormais, chaque fois que la légalité sera un obstacle à sa volonté, ou aux desseins de ceux qui la manipulent, la canaille (appelée Peuple par les manipulateurs) aura recours à l'insurrection, d'abord contre le roi, et , celui-ci éliminé, contre l'Assemblée soi-disant nationale elle-même...
Honoré Gabriel Riqueti, comte de Mirabeau, plus communément appelé Mirabeau, né le 9 mars 1749 au Bignon-Mirabeau, mort le 2 avril 1791 à Paris, fut simultanément ou successivement un révolutionnaire français, ainsi qu’un écrivain, diplomate, franc-maçon, journaliste et homme politique français.
Surnommé « l'Orateur du peuple » et « la Torche de Provence », il reste le premier symbole de l’éloquence parlementaire en France.
Louis Antoine Léon de Saint-Just, né le 25 août 1767 à Decize, mort guillotiné le 10 thermidor an II (28 juillet 1794) à Paris, est un homme politique français de la Révolution française, un des plus jeunes élus à la Convention nationale, membre du groupe des Montagnards, soutien indéfectible de Robespierre avec qui il est emporté dans sa chute du 9 thermidor.
D'une éloquence remarquée, il se distingue par l'intransigeance de ses principes prônant l'égalité et la vertu ainsi que par l'efficacité de ses missions au cours desquelles il redresse la situation de l'armée du Rhin et participe à la victoire des armées républicaines à Fleurus. Combattant politiquement les Girondins, les Hébertistes puis les Indulgents, il fait voter la confiscation des biens des ennemis de la République au profit des patriotes pauvres. Il est notamment l'inspirateur de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1793.
Un des multiples prébendiers de la Révolution qui permet à tous les opportunistes de s'enrichir tout en déclamant des hymnes à la vertu...
Georges Jacques Danton, né le 26 octobre 1759 à Arcis-sur-Aube et mort le 5 avril 1794 (16 germinal an II) à Paris, est un avocat et un homme politique français.
Danton est une des figures emblématiques de la Révolution française, tout comme Mirabeau, avec qui il partage un prodigieux talent oratoire et un tempérament impétueux, avide de jouissances (les ennemis de la Révolution l'appellent « le Mirabeau du ruisseau »), ou comme Robespierre, à qui tout l’oppose, le style, le tempérament et le type de talent. Il incarne la « Patrie en danger » dans les heures tragiques de l’invasion d’août 1792, quand il s'efforce de fédérer contre l'ennemi toutes les énergies de la nation et d'user de tous les expédients : pour vaincre, dit-il, « il nous faut de l’audace, encore de l’audace, toujours de l’audace, et la France sera sauvée ! », et il n'hésite pas, par pragmatisme, à entamer des négociations secrètes avec les monarques coalisés pour négocier une paix rapide.
Comme pour Robespierre, il s’est vite constitué autour de sa personne une légende. Et s’est déchaînée entre historiens robespierristes et dantonistes une polémique idéologique et politique qui a culminé sous la IIIe République. Pour les premiers, Danton est un politicien sans scrupules, vénal, capable de trahir la Révolution ; pour les seconds, il est un ardent démocrate, un patriote indéfectible, un homme d’État généreux.
Maximilien Marie Isidore de Robespierre, ou Maximilien Robespierre, est un avocat et un homme politique français, né le 6 mai 1758 à Arras et mort guillotiné le 28 juillet 1794 à Paris, place de la Révolution.
Aîné d'une fratrie de cinq enfants, il perd sa mère à l'âge de six ans. Puis son père abandonne ses enfants, et il est pris en charge par son grand-père maternel.
Après d'excellentes études au collège d'Arras et au collège Louis-le-Grand de Paris, licencié en droit, il devient avocat et s'inscrit en 1781 au Conseil provincial d'Artois, occupant même un temps la charge de juge au tribunal épiscopal.
Élu député du Tiers état aux États généraux de 1789, il devient bientôt l'une des principales figures des « démocrates » à l'Assemblée constituante, défendant l'abolition de l'esclavage et de la peine de mort, le droit de vote des gens de couleur, des juifs ou des comédiens, ainsi que le suffrage universel et l'égalité des droits, contre le marc d'argent. Il décide aussi de réglementer sévèrement la Bourse. Son intransigeance lui vaut bientôt d'être surnommé « l'Incorruptible ». Membre du club des Jacobins dès ses origines, il en est le plus illustre membre et l'une des figures de proue. Après la scission des Feuillants, il contribue à sa réorganisation et lui permet grandement de conserver le soutien de la plupart des sociétés affiliées de province.
Opposé à la guerre contre l'Autriche en 1792, il s'oppose à La Fayette et soutient la chute de la royauté. Membre de la commune insurrectionnelle de Paris, il est élu à la Convention nationale, où il siège sur les bancs de la Montagne et s'oppose à la Gironde. Après les journées du 31 mai et du 2 juin 1793, il entre le 27 juillet 1793 au Comité de salut public, où il participe à l'instauration d'un gouvernement révolutionnaire et de la Terreur, dans un contexte de guerre extérieure contre les monarchies coalisées et de guerre civile (insurrections fédéralistes, guerre de Vendée…).
À la suite de la victoire des comités contre les factions au printemps 1794, il contribue à faire cesser la politique de déchristianisation et fait voter, en qualité de rapporteur, le décret du 18 floréal an II, par lequel « le peuple français reconnaît l’existence de l’être suprême, et l’immortalité de l’âme », et la loi de Prairial, dite de « Grande Terreur ».
Attaqué et isolé au sein de la Convention par d'anciens dantonistes et des envoyés en mission rappelés, mais aussi au sein du gouvernement révolutionnaire par le Comité de sûreté générale et des collègues du Comité de salut public, il prend la Convention à témoin de ces dissensions le 8 thermidor an II, mais ne parvient pas à imposer ses vues. Le lendemain, empêché de parler par ses ennemis, alliés pour la circonstance aux modérés de la Plaine, il est arrêté avec son frère Augustin et ses amis Couthon, Saint-Just et Le Bas. La Commune entre alors en insurrection et le fait libérer, mais il perd du temps, et la Convention le met hors-la-loi.
Dans la nuit, une colonne armée s'empare de l'hôtel de ville, où il se trouve avec ses partisans, et il est blessé à la mâchoire dans des circonstances incertaines. Après vérification de son identité devant le Tribunal révolutionnaire, il est guillotiné dans l'après-midi du 10 thermidor avec 21 de ses partisans. Sa mort entraîne, dans les mois qui suivent, une « réaction thermidorienne », qui voit le démantèlement du gouvernement révolutionnaire et de la Terreur.
L'une des principales figures de la Révolution française, il demeure aussi l'un des personnages les plus controversés de cette période.
Les commentateurs décrivent Turgot comme un homme simple, honorable et droit, passionné de justice et de vérité : un idéaliste, ou « un doctrinaire » ; les termes « des droits naturels », « la loi naturelle », se trouvent fréquemment sous sa plume. Ses amis parlent de son charme et de sa gaieté dans les relations intimes, tandis qu'entouré d’étrangers, silencieux et maladroit, il donne une impression de réserve et de dédain. Ainsi ses amis comme ses ennemis s’accordent sur un point : sa brusquerie et son manque de tact dans les relations humaines ; August Oncken relève et souligne le ton de « maître d’école » de sa correspondance, même avec le roi.
Les jugements sont partagés à propos de ses qualités d’homme d’État, mais on considère généralement qu’il est à l’origine d’un grand nombre des réformes et des idées de la Révolution française. Souvent ce ne sont pas ses idées propres, mais on lui doit de les rendre publiques. Concernant ses qualités d’économiste, les avis sont aussi partagés. Oncken, pour prendre le plus négatif des avis, le voit comme un mauvais physiocrate et un penseur confus, tandis que Léon Say considère qu’il est le fondateur de l’économie politique moderne et que « bien qu’il ait échoué au XVIIIe siècle, il a triomphé au XIXe siècle ». Jugement partagé par Murray Rothbard, lequel y voit le plus grand économiste du XVIIIe siècle avec Cantillon et estime que, sur certains points, la théorie économique a perdu plusieurs dizaines d’années en ne s’inspirant pas de ses conceptions :
- « c’était un génie unique, ce qu’il est quand même difficile de dire des Physiocrates. Sa compréhension de la théorie économique était incommensurablement supérieure à la leur, et la manière dont il traita le capital et l’intérêt est quasiment inégalée encore aujourd’hui. »
Pour Schumpeter, sa théorie de la formation des prix était
- « presque irréprochable et, mis à part une formulation explicite du principe marginaliste, se trouve à une distance palpable de celle de Böhm-Bawerk. »
La théorie de l’épargne, de l’investissement et du capital était « la première analyse sérieuse de ces questions » et
- « a tenu remarquablement longtemps. Il est douteux qu’Alfred Marshall soit parvenu à la dépasser, et certain que J.S. Mill ne l’a pas fait. Böhm-Bawerk y a sans doute ajouté une nouvelle branche mais, pour l’essentiel, il avait repris les propositions de Turgot. »
- « La théorie de l’intérêt de Turgot est non seulement le plus grand exploit […] du XVIIIe siècle, mais elle préfigurait nettement une bonne partie des meilleures réflexions des dernières décennies du XIXe siècle. »
En somme,
- « il n’y a pratiquement aucune erreur discernable dans ce tout premier traité de la valeur et de la distribution, traité dont la mode allait tellement se développer dans les dernières décennies du XIXe siècle. Ce n’est pas exagérer que de dire que l’analyse économique a pris un siècle pour se retrouver où elle aurait pu en être vingt ans après la publication du Traité de Turgot si son contenu avait été correctement compris et assimilé par une profession plus éveillée ».
La Révolution française fut un long régicide: décapitation de Louis XVI le 21 Janvier 1793, après un procès sans honneur ni vérité. Les révolutionnaires les plus fanatiques ont réussi à se débarrasser du roi pour s'emparer totalement des pouvoirs et imposer leur dictature "afin de sauver les acquis du Peuple et leurs Droits".
1789, la seule grande révolution:
Dans l'histoire du monde, il n'y eut jamais qu'une seule vraie, grande et totale révolution, celle qui a commencé en France en 1789 et n'a jamais vraiment cessé, en dépit du Consulat, de Napoléon et des diverses restaurations. Toutes les autres révolutions dans le monde ne sont que des imitations, hormis les "révolutions conservatrices". En comparaison, la révolution russe de 1917 fut à la fois beaucoup plus radicale, destructrice, meurtrière, et pourtant moins profonde. Sans doute l'explication est-elle que la révolution russe fut un accident (gigantesque) dû à une série de hasards historiques, en premier lieu la guerre de 1914. Mais il s'est bien agi d'un accident. Avec un tsar un peu moins défaillant, la Russie aurait vraisemblablement pu survivre jusqu'à la défaite allemande qui se serait produite plus tôt en 1918. C'était l'inquiétude des dirigeants français et américains, autour du président Wilson, qui s'inquiétaient d'une possible survie triomphale du régime tsariste.
" La Révolution était achevée lorsqu'elle éclata. C'est une erreur de croire qu'elle a renversé la monarchie; elle n'a fait qu'en disperser les ruines...".
Chateaubriand; 1819, De la Vendée.
Après Taine ou Gaxotte, de nombreux historiens, Jean Tulard, François Furet, Denis Richet et Mona Ozouf, ont rapporté tous les éclairages nécessaires à l'interprétation de cet immense évènement. On pourrait aussi s'en rapporter à la très remarquable Sociologie des Révolutions publiée par Jules Monnerot chez Fayard en 1969.
Louis XVII; fils de Louis XVI et de Marie-Antoinette (1785-1795). Devenu roi de France & de Navarre à la mort de son père. Les révolutionnaires l'éliminèrent en le laissant crever dans un cachot. Derrière la vitrine des belles et grandes déclarations de principes: la barbarie. Les révolutionnaires, effrayés par l'ampleur de la résistance populaire à leur entreprise de démolitions, se laissent entraîner dans la folie meurtrière.
Jules Monnerot (1909-1985) qui consacra sa vie à la sociologie historique, esprit libre doué d'une exceptionnelle précision analytique, définit la Révolution française comme un changement radical et violent de régime politique. Jusque-là, rien de nouveau. Mais il approfondit l'analyse en observant les changements profonds qui ont précédé 1789, changements sociaux dans la répartition de la richesse et dans la configuration des pouvoirs. En bref, depuis trois siècles, le développement de la navigation, les grandes inventions et l'expansion du commerce avaient fait apparaître en France de nouvelles "occupations dominantes": les occupations nées du commerce avaient grandi aux dépens des occupations traditionnelles des deux premiers ordres, le clergé et surtout la noblesse, entraînant d'importants changements dans les rapports sociaux. Cependant, en France, contrairement à la Grande-Bretagne,les institutions sociales et politiques n'avaient pas suivi ces transformations.
Bien au contraire: les anciennes oligarchies privilégiées s'étaient fermées, résistant à toutes les tentatives de réformes et Louis XVI (1754-1793) n'eut jamais assez de trempe pour les faire plier. Il imposa par exemple, pour ne pas contrarier "sa" noblesse, quatre quartiers de noblesse pour devenir officier dans l'armée (1781).La monarchie aurait pu prendre la tête des changements comme ailleurs en Europe, mais elle ne le fit pas; par faiblesse, naïveté, et par un aveuglement certain.
Tout au long du XVIIIème siècle, les privilégiés agirent pour défendre leurs acquis. La réforme du ministre Maupeou (1714-1792) à l'encontre des parlements renvoyés par Louis XV à cause de leur obstruction aux réformes de modernisation de la justice, fut annulée par Louis XVI dès son accession au trône, sous le prétexte naïf qu'il fallait leur conserver leur place traditionnelle dans l'architecture de la monarchie française. Louis XVI s'imagina pouvoir les faire obéir par lit de justice mais c'est lui qui plia devant eux.
Massacres de septembre 1792 au Châtelet à Paris.
Toutes les réformes ultérieures de Turgot, Necker et Calonne afin d'assainir les finances publiques, furent successivement abandonnées devant la résistance des privilégiés qui, par démagogie et une dose de cynisme, se faisaient passer pour les défenseurs des peuples contre les abus de la monarchie.Dans un pays riche, l'État était menacé de banqueroute.
Pour trouver une réponse, Louis XVI fut contraint de convoquer les États Généraux ( 5 mai 1789) mais sans avoir de stratégie possible. Il rappela aussi Necker, un protestant, qui s'était fait une réputation de magicien des finances. entre-temps, avaient progressé au sein du tiers-état l'idée de l'égalité civile et celle des droits individuels opposés à ceux des anciens ordres.
Les États-Généraux se réunirent à Versailles le 5 mai 1789 sous un ciel bleu printanier mais certains sentaient que quelque chose qui appartenait à l'immuable allait vaciller...
Louis XVI avait admis le principe du doublement du Tiers État. Ceux-ci étaient donc aussi nombreux que ceux des deux autres ordres réunis. Situation nouvelle dont les conséquences n'avaient pas été mesurées. Un premier évènement renversant se produisit le 17 juin quand le Tiers se proclama Assemblée nationale, puis, par le Serment du Jeu de paume (20 juin), il s'engagea, par un acte d'initiative inouï, à ne se séparer sans avoir donné une constitution à la France. On prenait exemple sur la récente révolution américaine, imprudemment soutenue par la monarchie française sous le prétexte d'affaiblir l'Angleterre. Mais tous les jeunes officiers qui avaient servi dans le corps expéditionnaire français en Amérique étaient revenus dans l'ancestral royaume des lys avec, dans la tête, des idées neuves et exotiques... Les jeunes esprits étaient en ébullition...
Devant les résistances rencontrées, inimaginables pour l'esprit de Louis XVI, celui-ci perdit pied. Il ne sut quel parti prendre; désirant conserver la paix et en même temps l'édifice monarchique dont il avait hérité avec ses prérogatives de monarque absolu de droit divin. Influencé par Marie-Antoinette et sa petite cour, il revint aux mesures de forces qu'il n'était plus en son pouvoir d'employer. Il assembla des régiments étrangers autour de Paris, ce qui parut une provocation, et il renvoya Necker sans ménagements le 11 juillet. Dés lors, l'épreuve de force était enclenchée...Le ministre s'était fait une réputation d'adversaire de la haute noblesse, ce qui le rendit populaire. On nage alors dans la démagogie. Le peuple est sacralisé par les révolutionnaires: ce n'est plus la plèbe ou la populace mais l'immense majorité des "honnêtes citoyens".
Le peuple est tout. Selon le nouveau discours, il est rendu à la vie après des siècles de servitudes. La production des richesses c'est Lui, les forces vives de la Nation et de l'Empire, c'est Lui, l'honnêteté, le courage, le goût du travail, c'est Lui. Encore un peu de temps encore, et ce Peuple déifié deviendra dangereux pour ceux-là même qui l'avait hissé sur un piédestal jusque sur les autels ainsi profanés. Le Peuple redeviendra alors, ce qu'il n'a jamais cessé d'être: une multitude dangereuse, une masse incontrôlable, un torrent de violence déchaîné.
Le renvoi de Necker, ajouté à la disette qui sévissait à Paris à cause aussi, en partie, à la spéculation de quelques malins bien informés et bien introduits, l'action d'agitateurs rousseauistes, mit le feu aux poudres.
Trahi de tous côtés, dés 1789, le roi n'est plus en sécurité; il ne peut affirmer sa souveraineté pour faire avancer ses réformes.
La sanglante émeute du 14 juillet fut la réponse de la rue. Aprés quoi, le malheureux Louis XVI qui ne comprenait toujours pas la situation, ne put jamais reprendre l'initiative, devenant le jouet d'évènements incontrôlables...
La fossilisation de la société avait opposé des obstacles à la circulation des nouvelles idées sociales (le Tiers). Cet immobilisme était cependant apparent, mais il avait provoqué la montée de rancurs, de révoltes et d'espérances folles et aussi la convergence de mécontentements aussi contradictoires que ceux des parlements et du Tiers. C'est la logique de la plupart des révolutions. Pourtant, cela n'explique pas le cours particulier de la Révolution française, le rejet radical du passé, la "table rase"qui a tant stupéfait Edmund Burke (1729-1797), observateur précoce et perspicace de la "French revolution"...
Edmund Burke; détail, (peinture de James Northcote).Un observateur au jour le jour de la Révolution française dont il a vite compris la radicalité.
Dés 1790, avec une perspicacité et une prémunition étonnantes, E.Burke peut annoncer les terribles conséquences de l'ouragan qu'il voit naître. Avant tous les autres témoins, il comprend les bouleversements; il en identifie les principes directeurs et en tire les les conclusions.
Deux principes essentiels retiennent sa critique: les "droits de l'homme" et le principe qui soumet la souveraineté à "la volonté générale". Il comprend que cette révolution, radicale dans ses principes, le sera aussi dans ses actes et qu'elle ne peut se comparer à la révolution anglaise du siècle précédent.
Il prend la plume pour alerter l'un de ses correspondants français; cette correspondance se transforme en un livre publié à Londres le 1er novembre 1790: Reflections on the Revolution in France. On le traduit aussitôt à Paris, on se l'arrache partout en Europe.
Burke réfute tout d'abord toute comparaison avec la Glorious Revolution anglaise de 1688. Celle-ci a bien été une révolution, mais au sens astronomique du mot: retour d'un astre au point originel de son orbite, car ce fut une "révolution conservatrice" qui ne veut pas instaurer un régime nouveau mais marquer le retour de l'Angleterre à sa constitution naturelle, mettant fin aux divisions qui l'avaient déchirée depuis 1640, sous Cromwell (1599-1658) et sous les Stuart. Cette "révolution" de 1688 ne fonde nullement pour la nation anglaise le droit de choisir son roi. Le Bill of Rights de 1689 a valeur de constitution, liant indissolublement droits & libertés des sujets au principe de succession de la Couronne. On était donc aux antipodes de l'article 3 de la Déclaration des Droits d'août 1789:
" Le principe de toute souveraineté réside essentiellement dans la nation": nul corps, nul individu ne peut exercer d'autorité qui n'en émane expressément". Selon ce principe, la "nation", c'est-à-dire la "volonté générale" de Rousseau, peut à son gré modifier la constitution, déposer le monarque ou même supprimer la monarchie, ce qui sera fait en 1792.
Burke a vu d'emblée que le rejet du passé est caractéristique de la Révolution française.
10 août 1792: prise des Tuileries, siège du pouvoir exécutif, ou ce qu'il en reste, par le "Peuple".
Mais pourquoi cette folie de "la table rase" s'est-elle manifestée en France et pas ailleurs?
C'est à cette question que répondront plus tard Tocqueville et Taine.
Alexis de Tocqueville (1805-1859), élu député de la Manche de 1839 à 1851, a effectué des recherches minutieuses dans les archives modernes, donnant naissance à un chef d'oeuvre publié en 1856: L'Ancien Régime et la Révolution. Il observe que l'Ancien Régime a semé à la fois la démocratie individualiste et l'aristocratie, comprise comme une caste fermée, jouissant de privilèges injustifiés.